Le Président a promis de corriger les erreurs du passé, qu’il n’a pas citées. En fonction des intérêts, du camp auquel on appartient, il y a une liste d’erreurs à corriger. Celle de l’opposition comprend aussi le nombre de voyages à l’étranger, une certaine domination des balubas et le racolage au sein du défunt FCC et du mourant PPRD.
Les erreurs de gestion publique, d’orientation anti-patrie ou de déviation anticonstitutionnelle entrent dans champ de l’Etat de droit, qui les corrige automatiquement par l’application des règles juridiques.
Les erreurs dans les choix politiques, non susceptibles de responsabilité juridique, devraient être sanctionnées par les décisions politiques des parlementaires, par les électeurs au moment des élections lorsque le fauteur vient demander le renouvellement de confiance et par l’expression de l’opinion publique.
Les erreurs liées à la personnalité propre de Monsieur Félix-Tshisekedi, dans la mesure où, sans engendrer une responsabilité juridique ou politique, influent néanmoins sur la gestion publique, sont de la sphère de sa conscience. Promouvoir ou choisir de bonne foi un gars que l’opinion publique majoritaire considère moins sérieux, traitre ou voleur, se corrige par le niveau de sa propre conscience du danger que court la nation et de sa volonté à vouloir atteindre un idéal, qu’on ne peut pas réaliser avec des traitres, des voleurs et des corrompus. Tout le problème reste sur la conviction que le Chef de l’Etat peut se faire sur les personnes, s’il considère comme insuffisantes les « preuves » ou le jugement de l’opinion publique non confirmés par une justice en panne.
Pour avoir reconnu des erreurs commises à corriger, la conscience du Président de la République a bien fonctionné en commençant son processus de nettoyage personnel, qui devra se poursuivre pour et par lui-même avec leur identification, la mesure de leur ampleur et l’évaluation de leur impact sur la vie publique. Lui seul devra estimer s’il doit changer pour faire autrement ou rester ce qu’il est pour continuer dans les erreurs liées à sa personne.
Les erreurs les plus graves sont celles du peuple congolais, commises sous l’influence négative d’une politique de pérennisation du système de prédation, créée par le capitalisme mondial à travers l’esclavagisme, la colonisation et la mondialisation. Les erreurs d’un peuple soumis par inconscience notoire au pouvoir de l’argent d’une minorité.
Pour ma part, je trouve une seule erreur majeure et globalisante du régime, à corriger durant ce deuxième mandat du Président Félix-Antoine Tshisekedi. Il s’agit de l’accommodation avec le système de prédation.
La mouvance de changement et du peuple d’abord prônés par le héros et patriote Etienne Tshisekedi et par l’UDPS furent résumés dans l’annonce faite par le Président de la République Félix-Antoine Tshisekedi de « déboulonner le système maffieux ».
Rompre l’alliance FCC -CACH et écrouler la majorité parlementaire FCC pour lui donner un nouvel habit Union Sacrée de la Nation n’ont pas permis de changer la nature intrinsèque du pouvoir et l’esprit de ses animateurs. Une nature et un esprit congénitaux à l’existence de l’Etat en 1885 et perpétués par une gestion calamiteuse post-coloniale du pays.
Le système de prédation conçu pour servir les intérêts d’une minorité oligarchique par l’exploitation et au détriment de la majorité de la population, se nourrit de la faiblesse de l’Etat, de la pauvreté de la population à corrompre, de la violence sous toutes ses formes pour contraindre les faibles à donner des voix ou à céder leurs droits légitimes, de l’infantilisation des collaborateurs ployant sous le poids d’un gourou appelé autorité morale et de la division de la population par la tribalisation au rabais de la vie publique. Dans la prédation, l’Etat est un instrument au service du capitalisme libéral ; le système maffieux y trouve une zone de confort.
La bonne volonté du Président de la République dans les nominations, en espérant mieux, n’a pas empêcher le constat amer et évident à tout esprit lucide : « Mboka esi ekufa kala », « la justice est malade », « la corruption et le vol,opérés de manière endémique, sont une seconde nature chez certains »…
On ne peut déboulonner un système mafieux, comme celui existant en RDC depuis l’indépendance et bien consolidé par le régime AFDL-PPRD-FCC, sans un réel investissement dans la qualité du dirigeant et l’éducation civique du peuple qui génère la classe politique. C’est un système qui trouve ses racines dans la Constitution et le mental du peuple, qu’on ne peut déboulonner sans une vue holistique, un idéal et une stratégie globale de lutte contre les anti-valeurs.
Des pistes de solution, dont les matrices existent déjà :
1. La révolution de la conscience individuelle et collective : une solution systémique par l’implication du peuple dans la réalisation de son destin.
Depuis 2018, une femme politique, Marie-Josée IFOKU, y a pensé en proposant une doctrine politique originale et panafricaniste, que les africains colonisés ne doivent pas se gêner de prospérer : « La rupture du système de prédation par la Kombolisation pour la renaissance de la République ». Elle a proposé, en 2022 déjà, d’aller à la quatrième République pour corriger les erreurs ontologiques à l’existence de l’Etat congolais, celles qui sont inscrites dans son ADN, et pour envisager autrement la vie du pays par une nouvelle naissance de l’Etat et de la Nation.
La lutte de changement a besoin de quitter le niveau des slogans politiciens pour prendre la dimension philosophique faisant du peuple le moteur de la transformation et du progrès de la société. C’est sur cette lancée que se place la Kombolisation en vue d’une révolution de la conscience individuelle et collective.
Il faut une appropriation par le peuple de son destin pour féconder un autre système de vie publique autour d’une organisation adéquate de la société et d’une autre et nouvelle conception du pouvoir et du bien-être collectif des congolais.
Sans attendre un départ de toute la population en une fois, il est possible d’organiser un leadership national autour de quelques congolais moyennement incorruptibles, dévoués à la patrie, tenaces dans un idéal, sérieux dans le travail de mise en œuvre des actions décidées pour la libération mentale et la renaissance de la République. Fatshi Beton, qui a offert le pays à Dieu, demandé pardon pour les erreurs ou péchés graves du peuple et de ses dirigeants, montré suffisamment de volonté pour en terminer avec la guerre et les détournements, est en bonne position, en ce moment, pour guider les congolais sur la voie du changement.
2. Une volonté politique du leadership national largement partagée en vue d’une nouvelle conception de la vie publique
Seule une véritable volonté politique de « changement radical et qualitatif», capable de se communiquer à l’ensemble de la classe politique et de la société civile congolaises, peut engendrer une nouvelle forme de vie publique fondée sur les valeurs. Ce qui exige de partir de la vision commune de notre présent. Celle-ci devra se construire par un examen méticuleux de notre passé et de ce que nous sommes.
Une prise de conscience collective de nos erreurs, sans nécessairement les individualiser ou les attacher à Kasavubu, àMobutu, à Laurent Désiré Kabila, à Joseph Kabila ou Fatshi Béton, devra déboucher sur un autre code génétique du Congo.
Mouvement d’Action Thomas More, un groupe de réflexion et d’initiative de la société civile, qui milite pour le rayonnement des valeurs évangéliques dans tous les domaines de la vie publique et professionnelle, vient de proposer une voie du changement par la tenue du forum national d’évaluation post-colonisation de la République Démocratique du Congo.
Par sa proposition de Forum National, Mouvement d’Action Thomas More vise la mobilisation de la classe politique et de la société civile pour :
• Évaluer notre marche depuis 1960 à la lumière des actes de la Conférence Nationale Souveraine, le tout premier forum des congolais pour jeter les bases de la refondation du pays ;
• Analyser les causes profondes de l’instabilité politique et sociale en RDC ;
• Identifier les facteurs externes qui menacent la souveraineté et l’intégrité du pays ;
• Renforcer la cohésion nationale autour des valeurs républicaines ;
• Développer des stratégies pour renforcer la cohésion nationale et prévenir les conflits internes et les menaces extérieures ;
• Promouvoir un développement économique et social inclusif et durable ;
• Se donner les moyens de maitrise de notre espace de vie et du potentiel des ressources naturelles convoitées.
Un tel cadre de réflexion globale rejoint la préoccupation exprimée par le Président Félix-Antoine Tshisekedi d’avoir une commission chargée de réfléchir sur une nouvelle Constitution. Une commission de rédaction d’une nouvelle constitution gagnera à fonctionner aux côtés d’autres axés sur les autres thématiques essentielles qui lui servent de source matérielle (économie, culture, relations internationales, éducation, social, environnement…) pour une vision plus large et complète de notre vie commune.
3. La nécessité d’une nouvelle constitution, en lieu et place de la révision face à des clefs de la prédation enfouies dans des dispositions verrouillées et non révisables.
Il est vrai que la qualité d’animateurs des institutions publiques peut laisser penser à un problème de la Constitution, qui n’en est pas un, particulièrement lorsqu’elle n’est pas appliquée et les mécanismes existant de correction ou de sanction ne sont pas mis en mouvement. Une situation générale de désuétude des textes juridiques, parfois très bons, crée un Etat de non-droit au point d’avoir des individus plus forts que l’Etat ou capables de le soumettre à leurs caprices ou leur volonté.
Néanmoins la Constitution de 2006, soit dans certaines dispositions particulières, soit dans son esprit, soit dans sa rencontre avec les besoins réels et fondamentaux des citoyens, pose problème et altère le vivre ensemble au lieu de créer l’harmonie et la concorde.
Contrairement au professeur constitutionnaliste Mbata André, qui trouve bonne et meilleure la Constitution en vigueur, nous avons nombreux tenants d’une nouvelle Constitution et de la Quatrième République. Le Professeur Kabisa Boniface l’incrimine plus en pensant qu’elle est la justification de la guerre injuste que la RDC connait à l’Est du pays. Monsieur Bosembe Christian lui trouve un blocage dans le fonctionnement général du système de gouvernance, qui doit être un régime présidentiel, plus adapté aux réalités des congolais. Madame Marie-Josée Ifoku pense à la renaissance de la RDC par une nouvelle constitution des congolais, par les congolais et pour les congolais ; elle a même proposé une transition permettant de mieux se préparer à une nouvelle République pour ne pas commettre les erreurs d’impréparation expérimentée avec la brusque entrée dans l’indépendance et dans la démocratie multipartiste.
Par une nouvelle Constitution, bien pensée et préparée avec les représentants de la classe politique et les experts de la société civile, on corrigera certaines erreurs institutionnalisées dans le système de prédation comme :
• L’organisation de la gouvernance sur fond de poids politique acquis grâce au pouvoir de l’argent, des partis politiques chimériques et des accointances tribales et ethniques ;
• Le pouvoir prépondérant de l’argent dans le choix du personnel politique ;
• La rémunération du service politique en qualité de politicien, qui ne droit pas être une profession et demeurer un apostolat dont l’exercice est facilité par les moyens publics ;
• La création d’une caste de privilégiés et intouchables, qui se croient tout permis ;
• La confiscation du pouvoir par une oligarchie organisée autour de quelques familles et personnes qui ont pu exploiter l’opportunité d’une position dans l’appareil de l’Etat ou dans la coterie des dirigeants au pouvoir ;
• Des dépenses exorbitantes pour les élections ne correspondant pas aux moyens de l’Etat et pour un rendement globalement insignifiant ;
• L’inadéquation entre l’organisation politique et l’état des besoins socio-économiques et culturels des populations ;
• L’incohérence entre la volonté politique du Chef de l’Etat et la pratique politique dans son propre camp ou chez ses collaborateurs, qui ne développent pas assez de capacité d’alignement et de répercussion ;
• Un certain défaut de plus d’exigence en l’endroit du Premier ministre et de son gouvernement pour responsabiliser le Président de la République, pourtant constitutionnellement irresponsable sur la politique de la nation ;
• Les influences tribale, cotérique et politique dans le fonctionnement de la justice ;
• La géopolitique à forte connotation tribaliste et non orientée vers le développement des communautés de base ;
• Une politique sans idéal qui se concentrent sur les postes et avantages qu’ils procurent ;
• La fracturation inutile et paralysante de population et de la classe politique en partie majoritaire au pouvoir pour être à la mangeoire et une opposition sans idéal cherchant à ramasser les miettes qui tombent de la table de l’autre groupe ;
• Le maintien et l’entretien d’institutions inefficaces et inutilement budgétivores comme le Sénat, les assemblées provinciales, la CENI et tant d’autres ;
• Le sentimentalisme d’Etat face à la délinquance des politiciens, espions et traitres à la nation, accompagnée d’une tolérance du mal pour une stabilité politique de façade ;
• Le manque d’une ambition organisée et largement partagée de puissance africaine et mondiale tenant compte des défis suscités par le contexte géopolitique sous-régionale régionale et mondiale ;
• Une diplomatie de commisération ;
• La justification de guerre ou rébellion par des dispositions de la Constitution en vigueur ;
• Une nationalité acquérable à volonté et favorisant l’infiltration par des étrangers dans les vie nationale et une pratique à ciel ouvert de l’espionnage ;
• L’indiscipline caractérisée dans la gestion publique.
Ces erreurs ne sont pas celles du seul Président de la République, bien que son l’exercice conséquent de son leadership personnel et institutionnel pèse et compte beaucoup pour le changement. Elles sont celles des congolaises et congolais, commises dans le cadre d’un système de prédation, qu’il faille corriger ensemble comme nation soucieuse de son être au monde et consciente de son apport particulier à la Civilisation de l’Universel pour se faire respecter.
BAMUANGAYI KALUKUIMBI Ghislain
bamuangayi@gmail.com
Tél. +243 999 942 752