RDC–M23 : Un accord imminent, mais à qui profitera-t-il?

Alors que le Gouvernement Congolais s’apprête à conclure un accord historique avec le M23 à Doha, les attentes sont immenses, mais les interrogations les sont davantage. Derrière l’agitation diplomatique, se pose une interrogation fondamentale : Qui sortira réellement gagnant de cette manœuvre politico-sécuritaire ?

Un souffle politique pour Kinshasa

Pour le pouvoir central, ce processus pourrait offrir une bouffée d’oxygène. Dans un contexte sécuritaire tendu et à la veille des échéances qui pointent deja en ligne de mire, Kinshasa pourrait revendiquer un succès diplomatique et afficher un retour progressif à la stabilité dans l’Est. La délégation congolaise est conduite par Sumbu Sita Mambu, Haut-Représentant du chef de l’État, preuve que la Présidence accorde une attention directe à ces négociations.

Selon certaines sources proches du processus, l’accord est censé être signé le 27 juillet prochain à Doha, au Qatar.

Mais la population congolaise, en particulier dans les provinces meurtries, attend plus qu’un simple document : elle attend des actes.

Interrogé à Goma un enseignant d’une école secondaire de la place, reste à la fois sceptique et plein d’espoir :
« ils peuvent signer ce qu’ils veulent, mais tant que les armes ne se taisent pas nous ne verront jamais la paix » martèle-t-il .

Le M23,bénéficiaire tactique

En obtenant une place à la table des négociations, le M23 franchit un cap symbolique. Le groupe accusé par Kinshasa d’être à l’origine des nombreuses exactions , pourrait voir certains de ses combattants réintégrés, bénéficier de garanties sécuritaires, et garder un pied sur le terrain.
La représentation dans ces pourparlers par Benjamin Bonimpa, secrétaire permanent du mouvement impacte; témoignant de l’engagement du mouvement pour non seulement un retour à la paix mais aussi dans le jeu politico-militaire , on se rappellera tout de même que ce n’est pas la premiere fois que le M23 entre en négociation avec kinshasa. Le mouvement avait signé un accord avec le Gouvernement dans le passé en 2013 qui est resté malheureusement lettre morte faute selon ses régulières revendications, d’inexécution de bonne foi par la partie Congolaise.

Kigali, l’ombre toujours présente

Bien qu’officiellement à l’écart de l’accord avec le M23, le Rwanda est toujours au cœur des calculs.

L’accord Washington–Kigali-Kinshasa, signé le 27 juin, lui redonne une image d’acteur diplomatique et coopératif.
En parallèle, son influence dans les zones frontalières reste intacte, notamment à travers des réseaux économiques et sécuritaires discrets.

Les parrains extérieurs : paix ou intérêts ?

Les États-Unis et le Qatar jouent un rôleq d’appui stratégique dans ces pourparlers. Interrogé par RFI sur leur rôle, un porte-parole du Département d’État américain a confirmé :
« Nous continuons de coordonner étroitement avec le Qatar et d’autres partenaires afin de garantir que tous les efforts convergent vers l’objectif commun d’une paix durable. »
Le choix du Qatar de son côté comme pays hôte soulève aussi des préoccupations de la part de ceux qui le connaissent, ce pays qui n’est pas anodin car Doha s’affiche depuis quelques années comme médiateur des crises, tissant discrètement des liens en Afrique Centrale notamment par sa diplomatie minière et sécuritaire.

Au-delà de cette volonté affichée, se dessine aussi une logique d’accès aux ressources critiques, dont regorge l’Est de la RDC.

Une paix durable… ou un répit temporaire ?

Tout accord sans inclusion réelle des communautés locales et sans justice pour les victimes reste fragile, murmurent encore certains défenseurs des droits humains.
Les populations de l’Est, épuisées par les cycles de violence, savent que les promesses de paix ne signifient rien sans engagement sincère, et ce n’est qu’en ce sens que cet accord profiterait a toutes les parties.

Maître Masumbuko Kashengula Gloire: juriste , journaliste & analyste indépendant basé à Goma (Nord-Kivu) .