Ce sont des centaines de jeunes déplacés résidant dans des camps à l’intérieur et autour de la ville de Goma, qui ont présenté ce lundi 05 août 2024 au public local les œuvres artistiques pour les uns, et les performances footballistiques pour les autres; à travers un match de football et des activités culturelles organisés dans le camp de Bulengo par l’organisation Uhuru Knowledge Center, dans le cadre de son projet « Ndoto Art Thérapie ».
Le match de football a opposé deux équipes finalistes du tournoi organisé par la même organisation, ayant mis en lice les équipes de football issues des huit camps qui entourent la ville de Goma.
Les activités culturelles ont été l’occasion pour les artistes déplacés de présenter leurs œuvres après avoir été formés par d’autres artistes de Goma et de Sake.
D’après Albert Sivamwanza Isse, chargé de communication de Uhuru Knowledge Center, « toutes ces activités ont été conçues dans le but de renforcer la cohésion sociale et la cohabitation pacifique entre les communautés déplacées et de dénicher leurs différents talents ».
À l’en croire, ces jeunes artistes ont été formés durant sept jours dans différentes disciplines dont le slam, le dessin et la peinture, la danse contemporaine et moderne, ainsi que le théâtre; pour leur permettre de poursuivre leurs passions ainsi que leurs activités artistiques et sportives qu’ils exerçaient avant.
« La motivation c’est de permettre à ces jeunes dessinateurs, peintres, acteurs de théâtre, slameurs, sportifs et autres, de continuer leur vie artistique et sportive ici dans les camps; malgré les conditions qu’ils traversent » souligne Albert.
Le football nous avait déjà manqué…
À l’issue du match de football que son équipe a livré lors de la finale de la compétition organisée à leur intention; Mamy Rwango (20 ans), déplacée de guerre en provenance de Sake et actuellement locataire du camp de Lushagala, s’est dit réjouie de reprendre les activités sportives après six mois sans jouer.
« À Sake, le football était ma principale activité. Mais depuis que nous sommes ici, je n’ai plus eu l’occasion de jouer au foot. Ça fait six mois que je n’ai plus livré un seul match. Grâce à ce projet de Uhuru Knowledge Center, j’ai repris les entraînements et nous avons livré un bon match aujourd’hui jusqu’à l’emporter… » témoigne-t-elle.
Même impression pour Amisi Djuma, déplacé de guerre en provenance de Kitshanga et ancien joueur d’une équipe de football de cette partie du Nord-Kivu, qui loue l’initiative de l’organisation « Uhuru Knowledge Center » grâce à laquelle lui et ses anciens camarades footballeurs se sont à nouveau réunis en équipe après plusieurs mois de séparation suite à la guerre.
Transmettre des messages à travers le dessin
Parmi les bénéficiaires des formations organisées par Uhuru Knowledge Center figurent également les dessinateurs et les peintres. Ces derniers se sont illustrés lors des activités culturelles de ce jour, en présentant les différents tableaux qu’ils ont conçus.
Âgé de 12 ans, Amitié Baheni est l’un d’eux.
Déplacé de guerre en provenance de Sake, celui-ci a saisi l’occasion de présenter son tableau au site de Bulengo et d’expliquer son message aux visiteurs.
« Ici nous avons un tableau peint en couleur rouge qui signifie le sang de nos frères et sœurs qui continue à couler suite à la guerre. Nous voyons ici l’image d’une main qui tient, avec force, une arme avec intention de la briser. Ça veut dire tout simplement qu’on est fatigué avec la guerre et qu’on ne veut plus d’armes à feu… » a-t-il expliqué.
L’artiste peintre Machumu Zacharie (20 ans), originaire de Sake, était aussi de la partie. Il a présenté son tableau dénommé « Wakati »(« le temps »).
« Toutes ces images que vous voyez sur mon tableau expliquent la situation que nous vivons dans les camps. Ce sac de farine représente tous les dons que nous recevons. Ils sont importants mais ne suffisent pas pour soulager notre peine. La seule chose qui peut nous soulager véritablement, c’est de retourner chez nous. Certains d’entre nous prennent parfois les risques de regagner nos milieux malgré les affrontements qui s’y déroulent, et finissent par perdre la vie. Tout ceci est expliqué dans ce tableau… » déclare cet artiste.
D’autres messages similaires ont été véhiculés dans des scènes de théâtre avec l’illustration des rêves des enfants déplacés détruit par la guerre, des danses, des slams, et autres genres artistiques.
Retenons que Uhuru Knowledge Centers est un réseau des centres culturels dédié à l’éducation civique, à l’autonomisation des communautés rurales, à la promotion de la paix, de la tolérance, et la protection des droits des enfants dans les milieux ruraux par le biais du sport, de la culture et des arts vivants.
Emmanuel Barhebwa